L’enquête qui raconte le quotidien de designers au jour le jour. Les frustrations, les difficultés, les remises en question, les doutes mais aussi les joies et espoirs. L’objectif de cette enquête est de faire connaître le quotidien de ces métiers du design et de partager entre designers.

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La génèse de l'enquête

Il y a maintenant 8 ans, je décidais de quitter mon boulot chez Mcdonald’s pour faire le choix de reprendre les études. Pour ne rien vous cacher, j’étais parti pour faire 2 ans MAXIMUM. Je ne me sentais pas capable de faire plus et l’idée même de me rasseoir à un bureau pour écouter quelqu’un parler, me semblait déjà une épreuve.

J’avais choisi, pour je ne sais quel raison, un BTS MUC (Management des unités commerciales). En fait si, je sais le pourquoi. C’était une formation en alternance sur 2 ans. Qui dit alternance dit salaire + frais d’école pris en charge par l’entreprise.

Jour de rentrée. Le choc fut rude. J’ai tenu 20 minutes. Je ne me sentais pas à ma place. Perdu, déboussolé, déprimé, je décidais de rentrer chez moi, en me demandant ce que j’allais faire de ma vie.

Quelques jours plus tard, j’apprends par un ami qu’une nouvelle formation venait de s’ouvrir dans le bâtiment à côté de mon BTS : Bachelor Chef de projet multimédia. En résumé une formation qui allait m’apprendre les bases du web (design, code, marketing, communication, travail d’équipe…etc). À l’époque, j’aimais faire du montage vidéo et c’est tout… 

Pourtant, ma passion pour les métiers du web s’est très vite révélée et mon métier est alors devenu ma passion. Quelques années plus tard je finissais mon Bachelor avec mention (ça sert à rien mais ça fait toujours plaisir ^^) puis j’enchaîne avec un Master pour me spécialiser dans l’expérience utilisateur. Master validé avec succès également.

En 8 ans j’ai connu différents postes : motion designer, graphiste, webdesigner, graphiste-webdesigner, UI designer, UI UX designer, formateur, intervenant… bref j’étais le fameux “mec polyvalent”.

 

 Aujourd’hui j’évolue en tant que Product Designer. Un parcours pendant lequel j’ai rencontré un bon nombre de difficultés et de frustrations au quotidien. Mais peu à peu, année après année, j’ai su trouver des solutions résoudre ces difficultés et ainsi m’épanouir pleinement dans mon travail.

Cependant, depuis pas mal de temps, après avoir croisé de nombreux designers, étudiants (j’ai eu l’occasion de donner des cours), ou professionnels (freelances et salariés) en exercice, j’ai pris conscience que le métier de designer est un métier qui n’est pas assez valorisé, souvent caricaturé et dont on ne perçoit pas forcément pas complexité au quotidien.

J’ai donc décidé de lancer une grande enquête “Ton quotidien de designer” pour recueillir des témoignages de designers sur les difficultés de leur travail au quotidien. L’objectif de cette enquête est de mettre en avant ce quotidien et ses aléas. C’est aussi l’occasion d’échanger et de se partager des techniques, des astuces permettant de mieux s’épanouir. 

Pour être honnête je ne m’attendais pas à un tel engouement autour de cette enquête ! En quelques semaines à peine près de 207 designers ont apporté leurs témoignages.

J’ai senti comme un soulagement pour beaucoup, de pouvoir enfin partager leurs ressentis et leurs frustrations. En conséquent, je veux dire un grand Merci à tous celles et ceux qui m’ont raconté leurs quotidiens. Chose promise chose due, voici le résultat de l’enquête “Ton quotidien de designer”.

 

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Résultat de l'enquête :
TOn quotidien de designer

Avant de rentrer dans le vif du sujet, je tiens à préciser que je n’ai pas souhaité faire une enquête “quantitative”, comme vous avez pu le constater, le coeur de l’enquête est surtout basé sur les questions ouvertes. Celles-ci donnent lieu à des réponses plus personnelles et émotionnelles, qui je pense, sont plus pertinentes à partager.

Hey ! Salut à toi, dis moi, quel est ton métier ?
Ok good ! Dis m’en plus sur ta situation actuelle :
Hey ! Penses-tu que ton travail est apprécié à sa juste valeur ?

Premier constat de l’enquête. Presque 70% des personnes interrogées estiment que leur travail n’est pas apprécié à sa juste valeur. Ce chiffre est énorme et confirme mon impression pré-enquête. C’est un sentiment qui peut être dur à vivre quand on est passionné par ce que l’on fait et que nos collègues, clients ou responsables n’en perçoivent pas la valeur réelle.

Il faut de la pédagogie, expliquer, expliquer et encore expliquer. Donner des exemples. Prouver quand on le peut. Et le plus compliqué, être ferme et intransigeant sur les principes qui vous guide au quotidien. 

Je m’explique.

Un client ou votre supérieur vous demande de faire un copié collé d’un autre site web. C’est de votre responsabilité de refuser. Vous n’avez pas fait ces études, ce parcours et choisi cette vocation pour faire des copiés collés. L’accepter vous condamnera à l’accepter de nouveau plus tard. Soyez intransigeant.

Es-tu satisfait(e) de ton salaire actuel ?

Sans surprise ici on retrouve à peu de chose près la même proportion de personne que la question précédente. Une mauvaise considération de votre travail entraîne en général un salaire qui ne correspond pas à votre valeur sur le marché.

Alors que faire ?

Il n’y a pas de recette magique, de formule gagnante. Cependant, il existe des solutions :

  • Valorisez votre travail, montrez ce que vous faites, comment vous le faites, exposez, expliquez votre expertise et son importance pour le business de l’entreprise. Placez-vous toujours à la place de votre client, de votre patron et demandez-vous, pourquoi il m’augmenterait ? Qu’aurait-il à perdre si je démissionnais ? Perçoit-il ma valeur ajoutée ?
  •  Demander une augmentation de salaire n’est pas facile, mais si vous considérez que vous le méritez et que votre salaire n’est pas aligné avec votre valeur sur le marché, alors faites le.
  • Démissionnez. Nous sommes sur un marché dynamique qui recrute à tout va. La vie est trop courte pour perdre du temps dans une entreprise qui ne vous considère pas et dans laquelle vous n’êtes pas épanoui. Là encore, je ne dis pas que c’est simple, mais c’est possible. Personnellement je garde toujours en tête cette citation de Steve Jobs :

citation steve jobs

Pour la petite anecdote, après le BAC, j’ai commencé à travailler pour me faire de l’argent rapidement et ainsi gagner mon indépendance. J’ai bossé pendant 5 ans dans divers domaines : la restauration, caissier en grande surface, service de nettoyage…etc

Pendant 5 ans, j’ai testé beaucoup de choses (formation dans la sécurité, fac de droit, concours…etc). Mais surtout j’ai économisé. Et c’est ces économies qui m’ont permises de payer mon Bachelor (le Master étant en alternance, pas besoin).

J’ai réussi à reprendre les études à 23 ans après un break de 5 ans. Alors oui j’ai “galéré”, j’ai beaucoup travaillé pour en arriver là. Mais voilà ce qui fait que je ne resterais jamais dans une boite dans laquelle je ne me sens pas considéré.

Mon parcours n’est pas exceptionnel, chacune et chacun d’entre vous ont un parcours qui a fait de vous ce que vous êtes aujourd’hui. Ne l’oubliez et gardez la passion de votre travail.

Alors là attention… si tu devais te noter sur 10, combien te donnerais-tu ?

La majorité s’estime à 7/10 en moyenne. Alors pourquoi cette question ?

Je voulais voir la perception qu’ont les designers de leurs propres compétences.
Car le manque de considération entraîne souvent un manque de confiance en soi et on se sous-estime. Mon interprétation des réponses est la suivante : 

Je pense que la majorité des designers interrogés savent qu’ils peuvent faire des choses incroyables, qu’ils ont la motivation et les capacités pour être de très bons designers. La plupart doutent d’eux même et estiment qu’ils leurs manquent un petit quelque chose pour passer un cap. Savoir mieux argumenter. Savoir affirmer une opposition franche à une demande. Développer ses compétences dans tel ou tel domaine pour être encore meilleur. En somme, asseoir une autorité professionnelle. 

Si j’avais dû me noter, j’aurais certainement mis moi aussi, une note entre 7 et 8 sur 10. Pourquoi ?

Parce que quand on découvre un nouveau domaine on a tendance à s’emballer et à croire qu’on sait tout ou presque. Puis, plus on creuse plus on découvre qu’on ne sait rien. Qu’il y a des milliers de personnes qui en savent davantage. Alors on se compare et on admet qu’on en sait pas tant que ça au final. Par exemple j’étudie depuis un moment le Neuromarketing, et plus j’en lis, plus je me rend compte que je suis ignorant de beaucoup de choses. Le cerveau humain est une machine incroyable et on ne se rend pas compte que tout ce que l’on fait a une causalité. Du fait d’un impact mémoriel, d’un biais cognitif ou de gestion de la domination. Bref, c’est passionnant.

Pour en revenir aux comparaisons, il faut trouver le juste milieu et toujours se comparer par rapport à ce avec qui vous êtes “en concurrence” sur le marché. Par exemple, un joueur de foot de 4ème division ne va pas comparer ses performances à Messi. La seule chose que ça entrainerait, c’est une perte de motivation. En revanche il peut s’en inspirer pour progresser.

Dis moi, quelles sont tes principales frustrations dans ton travail au quotidien ?

Quelles sont tes difficultés dans ton quotidien de designer ?

C’était LES questions les plus importantes de cette enquête et je suis content car tout le monde à joué le jeu à fond. Des réponses très riches en enseignements, qui, encore une fois confirment mon ressenti pré-enquête. Les répondants sont frustrés dans leur quotidien et rencontre des difficultés pour plusieurs choses :

    • Le métier est incompris par les clients ou les autres métiers du digital.
      Comme le dit un des témoignages ci-dessus, le métier de designer ce n’est pas seulement de la pratique, ce sont des connaissances mais aussi des expériences, qui forgent des convictions. Le goût n’est pas inné, on l’acquiert au fil du temps, on affine son style année après année. Le design c’est avant tout une question de connaissances, de compétences, d’expériences et en dernier lieu de goût. Sauf que le goût, ce fameux goût que beaucoup croient avoir (et j’ai vu que vous avez beaucoup remonté ce sujet), on met des années à l’acquérir. C’est pourquoi entendre des clients/collègues vouloir nous imposer des modifications en fonction de leurs goûts, c’est rageant. Chacun son métier. Même si ça n’empêche pas d’en discuter et de collaborer. Un dev ne dit pas au designer quoi et faire et comment le faire. Et inversement.
    • Le design c’est simple.
      “Tu n’as juste qu’à faire ça et ça”, on l’a tous entendu ou subit. Je pense en particulier aux freelances qui subissent ce genre de réflexions de la part des clients (une stratégie pour minimiser le travail afin de payer le moins possible). En pratique c’est peut être simple, oui faire un design sur Sketch ou XD ne demande pas des compétences et connaissances incroyables. Mais faire un BON design si ! Avoir du goût, gérer la hiérarchie visuelle, les contrastes, créer un parcours visuel, bâtir une cohérence graphique entre typographies, couleurs, photos, icônes, illustrations, éléments design…etc BREF être un bon designer ce n’est pas chose aisée et il faut des années avant de l’être (si pour autant un jour on le devient)
  • Le manque de confiance en soi
    C’est une des réponses qui est le plus revenue, c’est assez incroyable, au moins 85% des répondants ont évoqués ce problème. De mon point de vue il y a différents approches possibles : D’abord, l’approche psychologique, vous avez une personnalité qui n’est pas forcément “extravertie” et vous avez du mal à vous affirmer. Bien qu’on puisse être introverti et s’avoir s’affirmer quand il s’avère nécessaire de l’être. Mais je pense (à vous de me dire) qu’ici on est plus en face d’un manque de confiance professionnel avant tout. Vous vous comparez beaucoup et donc vous n’avez pas confiance en vous. Vous pensez que vous ne savez pas assez de choses. Qu’il vous manque telle ou telle compétence, pour beaucoup vous dites ne pas avoir assez de connaissances en UX. Prendre conscience de ses points faibles c’est la première étape pour les amoindrir et puis peut être en faire ensuite des forces. Personnellement, j’analyse et j’interprète vos réponses comme un point “positif”. Quelque part, avoir conscience que le domaine dans lequel vous êtes est vaste, et dans lequel vous avez encore beaucoup de choses à apprendre, c’est une très bonne chose. Passé cette analyse, il est important de faire un travail personnel consistant à valoriser vos points forts et cessez de vous comparer. On se compare toujours en fonction ce qu’on sait de nous intérieurement par rapport à l’extérieur des autres. L’extérieur, c’est à dire le voile, l’illusion que chacun donne pour donner l’image qu’il souhaite. Vous pouvez être meilleur, et vous le savez. Chacun de nous le sait.
  • La difficulté d’argumentation.
    Avec le manque de confiance ce sont les deux éléments qui sont les plus revenus dans les réponses. Et oui, en école de design/web on n’apprend pas à argumenter. L’école tout court ne nous apprend pas comme les petits américains à parler et présenter en public dès le plus jeune âge. C’est un vrai problème. Du jour au lendemain on se retrouve à devoir expliquer ce que l’on a fait et pourquoi on l’a fait ainsi.

    C’est une problématique que j’ai très vite rencontré quand j’ai commencé ma carrière de designer, en conséquent je me retrouve dans beaucoup dans vos témoignages. Alors, comment ai-je fais pour apprendre à argumenter mon travail ?

    C’est un long processus qui s’est fait année après année. J’ai beaucoup lu des livres sur l’argumentation, la persuasion et la psychologie. J’ai aussi expérimenté pas mal de “techniques” pour influencer une prise de décision et j’ai pris en expérience. Également, j’ai donné des cours dans plusieurs écoles, ce qui, comme vous l’imaginez, m’a forcé à réfléchir au pourquoi et comment je travaillais. Mais la chose qui m’a le plus aidé, c’est l’apprentissage de l’UX design et du Neuromarketing. Grâce à ces connaissances, j’ai ainsi pu construire mes maquettes sur des règles et des arguments d’autorités. Je me suis ainsi positionné comme un “expert”, car un expert est celui qui est capable de comprendre, de réfléchir et d’expliquer. Qui dit expertise, dit crédibilité et crédibilité, persuasion plus aisée.

    Exemple d’un cas concret : Un client me demande de modifier une maquette : “Peux tu mettre cet élément en très gros stp”.

    – Déjà, première question, demandez toujours “pourquoi ?” 
    – Ensuite, expliquez le pourquoi vous l’avez mis dans cette taille en lui expliquant le principe de hiérarchie visuelle, de charge cognitive et de construction d’un parcours visuel. C’est important de comprendre pourquoi votre interlocuteur veut faire ça et son but derrière ça (vendre plus, avoir plus de clics…) pour comprendre son approche. Vous devez faire de la pédagogie pour que de lui même se rende compte qu’il ne sait pas de quoi il parle.
    – Pour finir, selon l’autorité de la personne en face de vous, vous lui imposez votre point de vue ou vous lui laisser la liberté du choix : “Voilà, maintenant c’est à vous de prendre la décision mais moi comme je vous l’ai dis j’y suis défavorable pour les raisons évoqués”. Avec cette construction, votre interlocuteur sera que d’une part, vous êtes l’expert et pas lui, d’autre part, il sera qu’il prend un mauvaise décision et en assumera les conséquences éventuelles. 

Bref, c’était un exemple rapide et simpliste mais qui vous permet de comprendre qu’on peut orienter l’interlocuteur à pencher vers telle ou telle décision. D’abord entendre, puis comprendre, ensuite expliquer, et enfin imposer ou laisser le choix final.

Conclusion de l'enquête TQDD

Pour conclure cette enquête, je souhaiterais remercier tous les participants pour avoir joué le jeu et de s’être confié sur leurs quotidiens. J’espère que cela va aider à faire connaître un peu plus la complexité de nos métiers et ainsi gagner en reconnaissance. Je me suis rendu compte que la plupart des problématiques, que beaucoup d’entre vous rencontre, je les ai rencontré aussi dans le passé. Mais j’ai su y faire face et les résoudre pour m’épanouir au mieux dans ma passion.

C’est pourquoi, je réfléchis activement à créer une formation vidéo pour permettre à chaque designer de passer un cap et de devenir le design qu’il aimerait être. C’est un projet qui m’enchante car j’aime partager mes connaissances et mes expériences. Le programme de la formation est en cours d’écriture mais déjà voici quelques thèmes :

Argumenter son travail / Design persuasif & Emotionnel / Quelques bases du neuromarketing utiles à la conception de design web / Les connaissances indispensables UX à connaitre quand on fait de l’UI / Automatisation du travail d’UI / Méthodologie de travail.

Voilà quelques axes de réflexion sur lesquels je souhaite créer ma formation. Je suis persuadé que ça peut être utile et apporter beaucoup à grand nombre d’entre vous. Si vous avez des suggestions, des thèmes, des pratiques que vous souhaitez voir dans cette formation, n’hésitez pas à venir m’en faire part sur Linkedin ou ailleurs 😉

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